Les petits cœurs bleus
On évoque souvent le concept des deux solitudes, et pour de bonnes raisons. Ce sont deux réalités parallèles. Deux ensembles de réalités distinctes. Ça ressemble un peu aux États-Unis où les Républicains et les Démocrates ne semblent pas vivre dans le même pays. Sauf qu’ici, en plus, on ne parle même pas la même langue. On vit donc encore plus dans des environnements médiatiques et sociaux distincts.
Autre truc qui diverge, c’est que, comme les francophones sont très minoritaires et que les réseaux sociaux se passent beaucoup en anglais, le point de vue anglophone s’impose partout comme une grosse vague qui écrase tout.
Du côté anglo de la réalité, l’idée d’indépendance est parfaitement farfelue.
le déclin du français est une folie inventée de toute pièce
le Québec ferait faillite le lendemain de son indépendance
le Québec ne parle même pas un vrai français mais plutôt un dialecte bouette
le Québec est la roue du carrosse canadien qui grince et qui ne roule jamais dans le bon sens
tout ce que le Québec fait pour protéger sa langue n’a qu’un seul but : manger de l’anglophone
Chaque commentaire est un dérivé de ces préjugés-là.
Est-ce que je vais débattre pour rétablir les choses? Ce serait une perte de temps totale. Pour qu’un débat ait la moindre chance d’être constructif, il est souvent préférable de discuter en one on one, et surtout, ça requiert un minimum de respect.
Il reste que c’est frustrant pour un militant comme moi (et avec ma grande gueule).
J’ai quand même trouvé une alternative satisfaisante (et semi-quétaine). Maintenant, dans les sections de commentaires décourageantes, je vais juste écrire un petit « Indépendance! » avec quelques petits coeurs bleus. Seulement un petit mot positif avec un peu d’amour. Montrer que nous ne sommes pas le monstre qu’on dépeint, mais aussi un petit signal à la personne qui, comme moi, pourrait être découragée par le déluge de commentaires négatifs. Ça lui envoie un petit signal de :
« T’es pas tout seul. »
Parfois, le nombre de likes fait que le commentaire remonte à la surface et ça fait qu’on existe encore un peu plus. Et c’est un des trucs cool que l’indépendance amène : la chance d’exister un peu plus.